LES PARTENAIRES : LE NOM LIEU

LES PARTENAIRES : LE NOM LIEU

La prévention du risque suicidaire en période de Covid-19 :
Nécessité de maintenir le lien et invention de nouveau dispositif en Santé Mental
Entretien avec Violette Aymé, coordinatrice du Nom Lieu

Le Nom Lieu accueille sur Bordeaux des jeunes de 15 à 25 ans, souffrant de troubles psychiques et/ou d’exclusion sociale depuis 3 ans.

En période de confinement, les institutions du champ de la santé mentale ont dû pour la plupart fermer leurs portes, notamment les structures accompagnant des jeunes publics. Sur un plan pratique et dans l’urgence, elles ont dû trouver des solutions pour maintenir le lien mais aussi continuer leur mission première de soin. A cette difficulté s’est ajouté la gestion des crises psychiques, familiales ou d’angoisse liées au Covid-19 ect. que chacun pouvait traverser, mais aussi les situations compliquées à domicile. En effet, dans ce contexte le lieu de l’institution ne peut plus faire tiers ou séparation entre le domicile parental et le sujet, ni office de refuge pour celui-ci. Les institutions se sont retrouvées à bricoler, à la va-vite, des solutions temporaires pour éviter la mise en danger potentielle des publics accueillit en structure de soin. Pour cela les professionnels ont du s’armer de courage et faire appel à leur désir tout en étant eux-mêmes inquiets, dans une situation complexe, parfois livrés à eux-mêmes, sans le cadre des murs de l’institution.

C’est à ce défi que l’ensemble des institutions, et particulièrement celles du sanitaire et du médico-social ont dû répondre. Grâce à notre expérience auprès des jeunes dans le domaine du numérique nous avons proposé dès le début de la crise notre aide aux professionnels de la santé mentale et de la protection de l’enfance dans la mise en œuvre des outils permettant la poursuite d’un travail à distance avec les jeunes accompagnés. A ce jour une vingtaine de structures dans la France entière ont fait appel au Nom Lieu pour mettre en place des dispositifs numériques.

Si nous avons recueilli beaucoup de témoignages de professionnels inquiets pour les jeunes qu’ils accompagnaient, et bien sûr, souvent, certains jeunes se sont retrouvés en grande difficulté pendant la période du confinement, ce dernier a pû être l’occasion pour les institutions de se ré-inventer et de prendre la mesure de l’importance des outils numériques dans le quotidien de leurs bénéficiaires. Des professionnels se sont ainsi laisser enseigner par les jeunes et ont considéré que la continuité d’un travail clinique, à plusieurs, à distance, est tout de même possible malgré les inconnus auxquels ils ont été confrontés.

Ce temps particulier peut permettre une relation thérapeutique différente et un changement dans les modalités de travail des équipes qui peuvent être bénéfiques aux bénéficiaires comme aux soignants. Pour les jeunes accompagné, le mal-être a pu continuer à se dire pour certain, et même parfois a pu commencer à se dire avec le confinement. Les forums mis en place ont pu accuser réception de mots de souffrance à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, ce qui ne pouvait se faire avant. Dans ces cas-là il me semble que ces dispositifs ont pu aider. Mais tous n’ont pas pu s’en saisir et pour certain la parole n’est d’aucun soutien. Le lien thérapeutique qui a pu s’établir par le biais d’ateliers numériques à distance, a permis autre chose qu’une parole, et des effets thérapeutiques ont pu être isolés. Des enfants ont pu témoigner de l’importance que ces ateliers réguliers avaient pour eux, faisant respiration, et office d’« échappatoires »  dans leur quotidien confinés. Le travail à distance, contrairement au travail en institution, comme l’ont témoigné plusieurs éducateurs, a aussi permis de favoriser le un par un, donc une meilleure clinique, plus fine, qui permet donc un travail plus précis.

Bien entendu le lien thérapeutique à distance ne  peut remplacer le soin en présence physique, mais cela peut ouvrir d’autres possibilités, au cas par cas. Cependant ce travail à distance ne doit pas se passer de réunions cliniques ni de l’horizon de la rencontre réelle.

Ainsi, ce confinement a permis de révéler des talents et des facettes inconnues des enfants et adolescents d’institution. Pour les professionnels qui ont acceptés de se laisser enseigner, de ne pas tout maîtriser, une tout autre institution semble possible. En outre, nous pensons que le travail numérique institutionnel crée presque un changement de paradigme dans le soin des institutions. En effet pour certains sujets c’est la présence des corps qui rend la vie sociale invivable et provoque des passages à l’acte. Pour éviter ces derniers les professionnels se doivent de rendre leur présence la moins envahissante possible. Alors qu’au contraire, en confinement, il s’agit ici de faire advenir la présence sur fond d’absence.

Pour connaitre les dispositifs d’accompagnement aux pratiques numériques mises en place par le Nom Lieu : https://lenomlieu.wordpress.com/2020/04/20/solidarite-covid-19-forum-dentraide-aux-pratiques-du-numerique-en-institution/