DOSSIER : LA SOUFFRANCE PSYCHIQUE CHEZ LES JEUNES ET LES ÉTUDIANTS

DOSSIER : LA SOUFFRANCE PSYCHIQUE CHEZ LES JEUNES ET LES ÉTUDIANTS

DOSSIER : LA SOUFFRANCE PSYCHIQUE CHEZ LES JEUNES ET LES ÉTUDIANTS

La santé mentale et le suicide chez les jeunes, seconde cause de mortalité chez les 15-25 ans, étaient avant même la crise sanitaire de la covid-19 une préoccupation majeure de santé publique. Quelles conséquences sur les jeunes pouvons-nous commencer à tirer de cette crise et quels sont les lieux pouvant accueillir cette souffrance ?

Souffrance des étudiants : un phénomène déjà ancien

La souffrance psychique des étudiants n’est pas un phénomène nouveau : déjà en 2009, une étude montrait que les étudiants étaient plus vulnérables aux problèmes de santé mentale que la population générale et des jeunes non-étudiants du même âge (Boujut, Koleck, Bruchon-Schweitzer et Bourgeois). Dès 2010, plusieurs écrits confirmaient une forte tendance à la hausse du nombre d’étudiants de niveaux supérieurs souffrant de problèmes de santé mentale (Daddona, 2011 ; Fier, 2010).

Le suicide fait partie des thèmes qui préoccupent le plus les étudiants (Etude Vandentorren) : 40 % de ces derniers le placent en premier avec la dépression. Une étude de la LMDE en 2017 estimait quant à elle que 68 % des étudiants déclaraient s’être sentis déprimés au cours des 12 derniers mois. Les principales causes de ce malaise seraient les études, les relations avec leurs parents et les problèmes financiers.   

Les effets de la crise sanitaire sur la santé mentale des étudiants

Le contexte de la crise sanitaire est donc venu accentuer cette tendance par les différents confinements et limitations de la vie sociale, scolaire et professionnelle et des incertitudes croissantes quant à l’avenir.

Lors du premier confinement en avril 2020 près d’un tiers des étudiants présentait des signes de détresse psychologique d’après une étude nationale. A Rennes, l’étude COVER portant sur l’évaluation de l’impact de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 auprès d’étudiants retrouve une  détresse psychologique chez 60.3% de cette population. Un étudiant sur cinq souffrait de troubles dépressifs et 37.7% de troubles anxieux. Plus d’un étudiant sur deux déclarait souffrir d’un sentiment de solitude et près d’un quart bénéficiait d’un faible soutien social. L’enquête Ipsos réalisé auprès des 18-24 ans et publiée en janvier dernier, estime que deux jeunes sur trois estiment que la crise actuelle liée au Covid-19 va avoir des conséquences négatives sur leur propre santé mentale et presque trois jeunes sur 10 ont pensé qu’il vaudrait mieux qu’ils soient morts ou ont songé à se blesser. 

Cet accroissement de la souffrance vient solliciter d’autant plus les structures de soins. Dominique Montchablon, psychiatre, chef de service de la Fondation santé des étudiants de France, alerte ainsi que depuis la rentrée on note l’affluence massive des demandes de prise en charge. «Le système est déjà englué en temps normal, mais en ce moment c’est carrément saturé». Ce constat est partagé par l’ensemble des acteurs qui soutiennent les étudiants. 

Claire Guérin, directrice de la maison des adolescents (MDA), note quant à elle une augmentation de 25% de l’activité de la MDA, tout public confondu, ainsi qu’une hausse de 70% des premières demandes. Les parents eux-mêmes viennent d’autant plus rechercher de l’aide pour leurs enfants. Pour Madame Guérin, ces chiffres traduisent un accroissement du mal être chez les jeunes mais aussi la survenue de troubles chez des jeunes qui bien que déjà fragiles n’auraient pas été jusqu’à consulter. La famille, les amis, l’entourage ainsi que tous les petits plaisirs de la vie (concerts, rencontres entre amis, activités sportives, etc.) maintenaient jusqu’alors une dynamique de vie, colmatant les difficultés psychiques pour ces jeunes.

Ainsi, les étudiants se retrouvent plus isolés, pour certains sans lien réel avec l’université, et avec peu d’entourage. Les troubles sont alors plus affirmés, notamment pour les troubles alimentaires et anxieux. Pour autant, si les situations ne sont pas radicalement différentes, la MDA observe faire plus d’orientations vers les urgences dans la mesure où les idées suicidaires sont plus avérées que par le passé où les états anxieux ou déprimés primaient sur ces dernières.

Une crise psychique qui ne fait que commencer ? 

Si jusqu’alors les chiffres témoignant d’un mal-être chez les jeunes, notamment ceux des suicides et tentatives de suicide, augmentaient finalement peu, de nombreux signaux laissent présager des difficultés croissantes.

Julien Muzard, coordinateur Clinique de Pass’Mirail à Bordeaux note effectivement que si l’accueil des jeunes –  notamment des étudiants en décrochage scolaire ou en difficulté pour sortir de chez eux – a augmenté depuis le premier confinement, pour autant la covid n’était jusqu’alors pas, ou peu, au centre des inquiétudes des jeunes accueillis. Or, ces dernières semaines, la situation semble faire plus d’écho pour ces jeunes. Une sorte de poids ou d’envahissement semble naître chez les jeunes après un an de rude mise à l’épreuve. Claire Guérin s’inquiète quant à elle des effets durables de la crise sur les jeunes et notamment des effets du décrochage scolaire pour un grand nombre de jeunes qui apparait comme une bombe à retardement.

Pour pallier, à ses nombreuses inquiétudes le gouvernement a mis en place un certain nombre de mesures venant renforcer les dispositifs déjà existants. Nous vous en proposons quelques-uns dans la page « partenaires » en complément de cet article.

Les dispositifs d’aides – Orientation

Les dispositifs étudiants :

  • Les centres de consultations au sein des universités, premier lieu de soin des étudiants : Ils comportent des professionnels de la santé mentale et assistants sociaux, gratuits sans avance de frais. les Bureaux d’aide psychologique universitaires (BAPU).
  • Les « chèque psy » : un forfait de trois séances de 45 minutes chez un psychologue, renouvelable pour 3 séances si besoin
  • L’association Aspytude propose également des consultations individuelles gratuites avec des psychologues

Les dispositifs jeunes :

  • Pass’Mirail (Bordeaux) : Pass’Mirail propose une approche des soins psychiques qui vise à favoriser la construction d’éventuels projets de soins ou projets de vie à un âge de transition entre adolescence et âge adulte.
  • La Maison des adolescents (Bordeaux, Bassin d’Arcachon, Médoc) : la MDA propose un espace d’accueil, d’écoute et d’accompagnement à l’orientation pour les adolescents et jeunes adultes. La personne peut venir seule ou accompagnée de la personne de son choix, d’un ami, d’un proche, d’un parent.
  • Les CPCT : Le CPCT Aquitaine propose différents lieux de consultations gratuites à destination des familles, jeunes adultes et adultes qui se trouvent dans une impasse subjective et qui souhaitent parler avec un psychanalyste. Le CPCT Rive Droite Cenon est à destination des adolescents et jeunes adultes (11 à 25 ans)
  • Le Nom Lieu : Le Nom Lieu propose plusieurs dispositifs d’accompagnement en direction des jeunes en situation de fragilité psychique, d’handicap psychique et/ou d’exclusion sociale sur le territoire de la Gironde, afin de faciliter, à eux et à leur famille, une insertion dans la vie sociale et professionnelle.

Les lignes d’écoute sont ouvertes pour se confier en tout anonymat :

  • Fil santé jeunes, Covid Ecoute, mais aussi SOS Amitié, Suicide Ecoute, le 3919 pour les cas de violences sexistes et sexuelles, SOS Homophobie etc. Ces numéros sont souvent associés à des plateformes en lignes qui proposent des discussions par chat ou des ressources pour « s’aider soi-même » : exercices de méditation, de relaxation, d’analyse de son mal-être…

Pour aller plus loin :

  • Le site soutien-etudiant.info répertorie toutes les aides possibles dans les trente académies scolaires du territoire. Gérée par l’association Nightline, qui tient deux lignes d’écoutes nocturnes en français et anglais, la plateforme répertorie les dispositifs, les lignes d’écoute existantes et propose aussi des conseils pour aider les jeunes à faire le point sur leur santé mentale.